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Descriptif :

Le projet « La fabrique de l’histoire telle qu’elle se raconte », de son acronyme HISTINÉRAIRES, se propose d’étudier les « Mémoires de synthèse des activités scientifiques » des habilitations à diriger des recherches soutenues en histoire depuis le début des années 1990 jusqu’à 2010. Ce corpus inexploité, distinct du « travail inédit » souvent objet de publication et du recueil d’articles, constitue un gisement d’informations sur la communauté historienne contemporaine. Il est susceptible de nourrir une véritable sociologie de la profession et une étude de l’historiographie et de ses évolutions non plus fondée sur les écrits de quelques chefs de file mais ancrée dans la masse des parcours de recherche d’une génération d’historiens.
Il prend acte de la valorisation de la réflexivité au sein de la communauté historienne et s’appuie sur les apports de la sociologie et de l’histoire des sciences.

À partir de ce corpus il s’agira, en premier lieu, de dresser un portrait collectif de la recherche contemporaine en histoire en analysant les itinéraires institutionnels et intellectuels des chercheurs concernés.
Au titre des aspects institutionnels nous collecterons notamment : les parcours universitaires, le temps passé dans l’enseignement secondaire, les lieux de soutenance, l’âge à la soutenance, le genre, la composition du jury, le devenir du candidat…
Au titre de l’itinéraire intellectuel et de façon non limitative : le volume de la production au moment de la soutenance, les références théoriques mobilisées (références aux sciences sociales et à la philosophie notamment), la connexion avec les historiographies étrangères, l’évolution des objets et des démarches de recherche, l’inscription revendiquée dans un « sous-champ » (histoire culturelle, histoire économique, histoire sociale…), l’inscription dans les débats historiographiques contemporains, l’implication dans la vie de la cité (réponses aux « demandes sociales », diffusion des savoirs) …
Ces données feront l’objet d’un traitement quantitatif et cartographique débouchant notamment sur une géographie de la recherche et des réseaux qui la structurent.

En second lieu l’enquête s’intéressera à la façon dont les historiens ont interprété l’exercice de « synthèse des activités scientifiques » certains optant pour un CV étoffé tandis que d’autres y analysent, de façon plus ou moins soutenue, le rapport personnel qu’ils entretiennent à l’histoire qu’il produisent – intégrant, ou non, la problématique auto-réflexive impulsée par les Essais d’ego-histoire rédigés et rassemblés à l’initiative de Pierre Nora. L’enquête permettra donc de dégager l’évolution d’un genre à l’origine peu défini. Comme pour les débats historiographiques ou/et épistémologiques le traitement des informations collectées sera essentiellement qualitatif tout en intégrant les apports de l’analyse de discours.

Ce corpus sera complété par des entretiens oraux avec des tuteurs d’HDR et l’étude de la genèse de cette exigence introduite avec l’arrêté du 5 avril 1988 relatif à l’habilitation à diriger des recherches.

Au total, il s’agira à la fois de dresser la cartographie d’une communauté telle qu’elle n’a jamais entreprise en s’appuyant sur ce qu’en disent ses acteurs soit le projet d’une historiographie « vue d’en bas » pour reprendre un mot d’ordre devenu classique de l’historiographie. De ce point de vue, la subjectivité à l’œuvre dans ces écrits, bien évidemment contrainte par leur caractère institutionnel, loin d’être un handicap permettra d’informer la recherche sur les stratégies institutionnelles et intellectuelles à l’œuvre.

Programme conduit dans le cadre des projets blancs ANR