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vendredi 13 décembre 2024 à 14h, Université Lumière Lyon 2, Campus Berges du Rhône, 4bis Rue de l’Université, Lyon 7, Bâtiment Déméter, Salle DEM.221.
Titre des travaux : La puissance de l’abbaye cistercienne de Clairvaux, XVIe – XVIIIe siècle.
Membres du jury :
M. Philippe MARTIN, Université Lumière Lyon 2, Directeur de thèse
M. Eric SUIRE, Université Bordeaux-Montaigne, Rapporteur
Mme Isabelle BRIAN, Université de Lorraine, Rapporteure
M. Daniel-Odon HUREL, CNRS, Examinateur
Mme Fabienne HENRYOT, ENSSIB, Examinatrice
Mme Caroline GALLAND, Université Paris Nanterre, Examinatrice
Résumé :
La puissance de l’abbaye cistercienne de Clairvaux se déploie à trois échelles entre le XVIe et le XVIIIe siècle : l’échelle locale, socle temporel de la puissance ; l’échelle du monastère, en tant que centre de commandement ; l’échelle de l’ordre cistercien, au sein de sa filiation et dans ses relations avec l’abbé de Cîteaux et les trois autres Premiers Abbés (La Ferté, Pontigny et Morimond). Notre travail propose une conceptualisation de la notion de « puissance » appliquée à l’abbaye de Clairvaux, empruntant aux domaines de la géopolitique, de la philosophie et de la géographie. À l’échelle locale, l’immense territoire claravallien s’organise en trois principaux espaces : le cœur de puissance proche du monastère, les deux pôles secondaires de puissance au nord et au sud et la constellation septentrionale, un ensemble plus éloigné et disparate. Clairvaux possède des revenus typiques des Cisterciens : granges, forges, forêts et droits seigneuriaux. Sa particularité est liée au caractère démesuré d’un tel patrimoine et à sa capacité à le mettre parfaitement en valeur à partir des années 1630,pour le rendre attractif et pouvoir l’affermer au plus haut prix. Elle parvient à mettre un terme, à partir de la deuxième moitié du XVIIe siècle, aux conflits géopolitiques locaux auxquels elle est confrontée. Durant le XVIIIe siècle, les revenus de Clairvaux augmentent fortement, faisant de l’abbaye l’un des plus riches établissements monastiques français. La deuxième échelle de puissance se constitue du monastère lui-même. La puissance est d’abord politique. La communauté impose sa volonté souveraine lors des élections abbatiales, faisant le choix de personnes capables de défendre ses choix politiques et religieux. À partir des années 1740, les interventions royales, par l’exclusion de certains candidats, limitent cependant la puissance politique interne d’une communauté qui tend à l’autocensure. La puissance du monastère est ensuite démographique. Clairvaux présente une grande attractivité du début du XVIIe siècle jusqu’aux années 1670, avant de connaître une baisse progressive de sa population monastique, non dénuée de périodes de reprises réelles mais limitées parleur ampleur. La puissance s’exprime, enfin, par la pierre. Clairvaux propose de véritables lieux de mémoire où la figure de saint Bernard est fortement présente. Le lieu jouit d’un très grand prestige sacré, jusqu’au XVIIIe siècle. Clairvaux s’inscrit pleinement dans le mouvement de reconstructions monastiques à la fin du XVIIe siècle et durant le XVIIIe siècle. Outre l’aspect fonctionnel, la construction d’une cour d’honneur et d’un immense cloître permet à l’abbaye de tenir son rang et d’exprimer sa puissance monumentale. La troisième et dernière échelle de la puissance claravallienne est celle de l’ordre cistercien lui-même. Par un effet collatéral de la commende, Clairvaux a autorité sur la quasi-totalité de sa filiation, qu’elle administre avec fermeté. Elle cherche à imposer sa vision politique au sommet de l’ordre. Le monastère claravallien seconsidère comme le leader naturel des Premiers Abbés et parvient, durant plusieurs décennies de la première moitié du XVIIe siècle, à mettre en place un gouvernement collégial avec l’abbé de Cîteaux dans lequel elle occupe une place à part. À partir des années 1670, l’abbé de Cîteaux souhaite imposer un gouvernement solitaire, excluant Clairvaux et reproduisant le modèle politique de la monarchie absolue, imposé au niveau national. Malgré des conflits violents, la puissance de Clairvaux est de plus en plus souvent mise en échec, ce qui oblige l’abbaye à repenser sa place au sommet de l’ordre cistercien. Au terme de ce parcours, notre analyse multiscalaire et diachronique décrit donc une abbaye de Clairvaux animée par des dynamiques fluctuantes, parallèles ou opposées, qui constitue une véritable puissance mouvante et protéiforme entre le XVIe et le XVIIIe siècle.