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Titre de la thèse : La commémoration du génocide arménien en France de 1965 à 2015 : religion et identité

Composition du jury :

M. Boris Adjemian, directeur de la bibliothèque Nubar de l’UGAB à Paris, HDR, rapporteur

Mme Dzovinar Kévonian, professeure d’histoire contemporaine, Université de Caen-Normandie

M. Olivier Rota, professeur d’histoire-HDR, Université Catholique de Lille, co-directeur

M. Christian Sorrel, professeur émérite d’histoire contemporaine, Université Lyon 2, co-directeur

Mme Mélanie Trédez-Lopez, maître de conférences HDR en droit public, Université d’Artois

Mme Anne-Laure Zwilling, ingénieure de recherches HDR, CNRS, Strasbourg, rapportrice



Résumé :
La commémoration du génocide arménien en France comporte de nombreux éléments religieux qu’il faut identifier pour lesexpliciter, et dont la mise en place et l’agrégation autour des cérémonies commémoratives du 24 avril est la matière decette thèse, avec une chronologie comprise entre 1965, début des commémorations extérieures arméniennes, et 2015.L’analyse de l’organisation diasporique et l’histoire religieuse des Arméniens nous permettent de mieux cerner le rôle de lareligion dans les modalités de la commémoration officielle du génocide, initialement créée par l’Église apostolique, gardiennede l’identité arménienne. La presse quotidienne ou hebdomadaire régionale est notre source principale, avec les journaux desdifférentes Églises arméniennes, pour avoir accès aux discours ecclésiastiques sur le génocide et sa commémoration.
Laquestion de la mémoire, comme héritage, de sa transmission, et du rôle de la tradition, qui sont à la base de tout travailcommémoratif, est centrale. La mémoire collective est au premier plan, car c’est elle qui joue un rôle prédominant dans laformation de l’identité d’un groupe. L’identité arménienne est fondée par une mémoire religieuse, qui ne tient pas uniquementà la pratique, et peut même exister indépendamment d’une croyance ou d’une foi. Le lien entre mémoire et commémorationest induit par le principe même de la commémoration, consubstantielle au devoir de mémoire, ici clairement un héritagechrétien. La mémoire, en tant que souvenir vécu, est affective et passionnelle, ce qui lui confère un caractère sacré dans lecas d’une mémoire religieuse : le religieux a donc à voir avec la mémoire collective. Cette mémoire collective est évolutive,et la commémoration à travers les différentes générations arméniennes passe d’une reprise habile des symboles de laRépublique française, insistant sur la qualité de l’intégration arménienne, à l’utilisation massive d’une symboliqueapostolique, notamment monumentale. Ce passage du remémoratif au revendicatif, à la recherche d’une reconnaissance dugénocide par la France, accompagne la transformation d’une mémoire identitaire religieuse vers une mémoire centrée sur legénocide. Considéré comme un génocide de chrétiens (être arménien c’est être chrétien), sa commémoration est devenueune religion civile appuyée par l’Église apostolique arménienne, qui en tant que facteur d’unité principal fournit le cadre decompréhension nationaliste et les symboles matériels : l’identité prime nettement sur la foi. Dans le cadre de communautésreligieuses avec une « histoire héritée » forte avec une identité « ethnique » revendiquée, le religieux semble perdurerd’autant plus fortement du fait de cette symbolique culturelle, en lien avec la gestion chrétienne de la mort. La mémoirereligieuse peut ainsi être une mémoire complètement identitaire quand la religion est quasi-ethnique et s’identifie à unpeuple. Dans un contexte de lutte contre la sécularisation propre à l’Occident, la religion peut renforcer l’affirmationidentitaire d’une diaspora, illustrée par la commémoration, pour son propre bénéfice. La dimension religieuse de lacommémoration du génocide a ainsi un lien avec le rôle mémoriel dévolu à la religion, très marqué dans l’exemplearménien, et illustré par l’utilisation permanente des termes martyrs, saints, résurrection, dans une optique identitaire plusque théologique.