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Cet essai entend montrer, à partir de cas précis, que la BD franco-belge « classique » reflète et diffuse une certaine vision du monde, basée sur des valeurs qui peuvent aujourd’hui paraître contradictoires : anticommunisme, colonialisme, mais aussi engagement en faveur des plus démunis. La création des années 1930-1950, faite d’allers et retours entre les deux pays et les deux cultures, est en effet, pour une large part, portée par des milieux catholiques plus ou moins conservateurs, mais sociaux. Des figures à la fois conquérantes et solidaires, comme celle du pieux chevalier défendant les plus faibles, ou celle du missionnaire barbu soignant les autochtones, naviguent ainsi d’une série et d’un épisode à l’autre. Certains auteurs amorcent toutefois une rupture avec la tradition idéologique franco-belge bien avant l’émergence d’une BD pour adultes cultivant l’irrévérence.

On s’attachera à relire sous cet angle politico-religieux des récits régulièrement réédités, comme les Tintin en noir et blanc ou les Spirou de Franquin, mais aussi des séries quelque peu tombées dans l’oubli, comme Johnny et Annie de Renaat Demoen ou Chantal de Robert Rigot.

Au final, cet essai propose un double périple à travers les cases : mieux cerner les soubassements idéologiques de la création franco-belge et redécouvrir certains pans de l’histoire européenne par le biais du 9e art.