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Colloque organisé par le Centre Georges Chevrier (UMR 7366) et le LARHRA (UMR 5190)
Coordinateurs : Alain Bonnet (Université de Bourgogne), Natacha Coquery (Université Lumière Lyon 2, IUF)
voir affiche et programme joints en bas de page
Jules Lermina, écrivain anarchiste, fit paraître à Paris, en 1869, une Histoire de la misère, sous-titrée Le prolétariat à travers les âges. Dans la conclusion de son récit, il affirmait l’universalité de cet état, le liait à la civilisation elle-même et annonçait sa disparition :
« L’histoire de la misère, c’est l’histoire du monde : il faudrait, interrogeant la carte universelle à chaque âge, à chaque période, décrire chez tous les peuples, dans toutes les régions, les accidents sociaux, les particularités vitales […] Qu’est-ce donc que cette civilisation dont le seul résultat est d’enfanter la misère ? Qu’est-ce que ce progrès qui dégrade, cette marche sociale en raison de laquelle tout recule ? Et enfin : A quel vice primordial, essentiel et continu, faut-il attribuer cette anomalie monstrueuse qui se formule en une équation : Civilisation égale misère […] O Misère, depuis quarante siècles, de tes doigts amaigris tu étreins le travailleur ! Mais l’heure est venue, ton règne hideux est fini, tu t’en iras où s’en sont allés l’inégalité, l’oppression, la hiérarchie, le bon plaisir, la foi, où s’en iront l’ignorance et l’improbité. Misère ! Tu as rencontré l’athlète qui te vaincra. Et cet athlète s’appelle la Révolution sociale. »
La prophétie de Lermina apparaît, presque un siècle et demi plus tard, exagérément optimiste. Loin d’avoir disparu grâce au développement des capacités productives, aux progrès technologiques ou aux luttes sociales, la misère semble étendre son empire. Tout au moins, la perception commune n’est plus à l’espoir d’un avenir meilleur. La crainte d’une extension continue des fléaux écologiques et des reculs économiques (crise, récession, précarisation) et les crispations identitaires jettent un voile sur le devenir de l’humanité.
L’objet de ce colloque est double. Il reviendra sur les discours qui ont été tenus sur la misère et sur les représentations qui en ont été faites, du XVIIIe siècle à nos jours. Il donnera également l’occasion de s’interroger sur l’inscription de la misère dans le système économique : comment la misère engendre une économie particulière, à la fois pour ceux qui la subissent et pour ceux qui en profitent ? A partir de cette double approche (culturelle, économique), il permettra de faire un point sur les différentes significations attachées à cet état particulier et à leur évolution historique, dans le temps et dans l’espace : la misère ressortit-elle à une expérience individuelle ou est-elle une calamité qui afflige un groupe social ? ; la misère est-elle identique au malheur, à la déchéance ou à la privation ? Peut-on constituer la misère en objet historique, c’est-à-dire en une réalité autonome susceptible d’une analyse critique ?
La rencontre vise à croiser les regards de spécialistes de différents espaces et disciplines, l’histoire et l’histoire de l’art, mais également la sociologie, l’économie ou l’anthropologie. Elle se déclinera selon les axes suivants :
1- Régulations de la misère
• Identification et évaluation de la misère.
• Les politiques de la misère : acteurs institutionnels, philanthropes, fondations…
• Solidarités face à la misère : famille, voisinage, organisations.
2- Economies de la misère
• Le travail des sans-travail ; l’organisation d’une économie parallèle ; la misère comme source de création de valeur.
• Production, distribution, consommation : les biens destinés à la classe miséreuse.
• L’exploitation économique de la misère : dealers, passeurs, marchands de sommeil et autres exploiteurs.
• Géographies de la misère : de la misère lointaine à la misère locale.
3- Représentations de la misère
• La misère illustrée : images du pauvre dans la littérature et dans les arts.
• La misère médiatisée : constructions d’un discours médiatique sur la misère.
• Philosophies de la misère : théorisations de l’indigence.
Langues
Les résumés et les articles peuvent être rédigés en français ou en anglais.
Calendrier
novembre 2017 : appel à communications.
15 janvier : remise des propositions (3 500 signes) et CV (une page).
février 2018 : sélection des propositions.
17 septembre 2018 : remise des textes (20 000 signes). Les articles circuleront entre les président.e.s de session et les participant.e.s.
18 et 19 octobre 2018 : tenue du colloque, à Lyon.
1er semestre 2020 : publication des actes.
Comité scientifique
Laurent Baridon, Université Lumière Lyon 2
Axelle Brodiez-Dolino, CNRS, Centre Norbert Elias
Laurence Fontaine, EHESS
Ludovic Frobert, Université Lumière Lyon 2
Rossella Froissart, Aix-Marseille Université
Estelle Galbois, Université Toulouse Jean Jaurès
Angela Groppi, Université La Sapienza
Jean-Luc Outin, CNRS, Centre d’économie de la Sorbonne
Jacques Rodriguez, Université de Lille
Ariadne Schmidt, Université de Leyde
Bertrand Tillier, Université Paris I Panthéon Sorbonne.
Contact and submission
Alain Bonnet Alain.Bonnet@u-bourgogne.fr
Natacha Coquery natacha.coquery@wanadoo.fr
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The Markets of Misery, 18th-21th C.
Conference organized by the Centre Georges Chevrier (UMR 7366) and the LARHRA (UMR 5190)
Coordinators: Alain Bonnet (University of Bourgogne), Natacha Coquery (University Lumière Lyon 2).
Jules Lermina, an anarchist writer, published in Paris in 1869 a History of Misery, subtitled The proletariat through the ages. In the conclusion, he affirmed the universality of this state, linked it to civilization itself and announced its disappearance:
« L’histoire de la misère, c’est l’histoire du monde : il faudrait, interrogeant la carte universelle à chaque âge, à chaque période, décrire chez tous les peuples, dans toutes les régions, les accidents sociaux, les particularités vitales […] Qu’est-ce donc que cette civilisation dont le seul résultat est d’enfanter la misère ? Qu’est-ce que ce progrès qui dégrade, cette marche sociale en raison de laquelle tout recule ? Et enfin : A quel vice primordial, essentiel et continu, faut-il attribuer cette anomalie monstrueuse qui se formule en une équation : Civilisation égale misère […] O Misère, depuis quarante siècles, de tes doigts amaigris tu étreins le travailleur ! Mais l’heure est venue, ton règne hideux est fini, tu t’en iras où s’en sont allés l’inégalité, l’oppression, la hiérarchie, le bon plaisir, la foi, où s’en iront l’ignorance et l’improbité. Misère ! Tu as rencontré l’athlète qui te vaincra. Et cet athlète s’appelle la Révolution sociale. »
The prophecy of Lermina appears, almost a century and a half later, exaggeratedly optimistic. Far from ha ving disappeared due
to the development of productive capacities, technological advances or social struggles, misery seems to extend its empire. At the very least, the common perception is no longer the hope of a better future. The fear of a continuing spread of ecological scourges and economic decline (crisis, recession, precariousness), and the identity tensions cast a veil on the future of humanity.
The purpose of this symposium is twofold. It will report back on the speeches that have been made on the misery and the representations made of it, from the eighteenth century to the present day. It will also give us the opportunity to question the inclusion of poverty in the economic system: how misery generates a particular economy, both for those who undergo it and for those who profit by it? From this dual point of view (cultural, economic), the symposium will enable the audience to take stock of the different meanings attached to this particular state and to their historical evolution, both in time and in space: does misery come from an individual experience or is it a calamity that afflicts a social group?; is misery identical to misfortune, degradation, or deprivation? Can misery be constituted as a historical object, that is to say, an autonomous reality susceptible of a critical analysis?
This conference aims at bringing together scholars with expertise across a range of geographic areas and disciplines, history and history of art, but also sociology, economics or anthropology. It will be based on the following axes:
1- Regulation of misery
· Identification and evaluation of misery.
· The politics of misery: institutional actors, philanthropists, foundations…
· Solidarity facing misery: family, neighborhood, organizations.
2- Economies of misery
· The work of the unemployed; the organization of a parallel economy; misery as a source of value creation.
· Production, distribution and consumption: goods destined for the miserable class.
· Economic exploitation of poverty: dealers, smugglers, sleeping traders and other exploiters.
· Geographies of poverty: from distant misery to local misery.
3- Representations of misery
· Misery illustrated: images of the poor in literature and the arts.
· Mediatized misery: constructions of a media discourse on misery.
· Philosophies of misery: theorizations of indigence.
Languages
The articles and the proposals may be submitted in the following languages: French and English.
Key dates
November 2017: call for papers.
15 January 2018: submission of proposals (3,500 signs) together with a one page CV.
February 2018: selection of proposals.
17 September 2018: handing over of texts (20,000 signs). Papers will circulated to Chairs and Discussants.
18 and 19 October 2018: symposium, at Lyon (France).
1st semester 2020: publication of proceedings.
Scientific committee
Laurent Baridon, Lyon 2 University
Axelle Brodiez-Dolino, CNRS (Centre Norbert Elias)
Laurence Fontaine, EHESS
Ludovic Frobert, Université Lumière Lyon 2
Rossella Froissart, Aix-Marseille University
Estelle Galbois, Toulouse Jean Jaurès University
Angela Groppi, Sapienza University
Jean-Luc Outin, CNRS (Centre d’économie de la Sorbonne)
Jacques Rodriguez, Lille University
Ariadne Schmidt, Leiden University
Bertrand Tillier, Paris I Panthéon Sorbonne University.
Contact and submission
Alain Bonnet <Alain.Bonnet@u-bourgogne.fr>
Natacha Coquery <natacha.coquery@wanadoo.fr>