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organisé par Marie-Laure Archambault-Küch, Maxence Demeule, Antoine Ropion et Bastien Tourenc

L’axe « Régulations : marchés, populations, circulations » du LARHRA regroupe des chercheurs et des chercheuses travaillant sur des thématiques très diverses, mais tous engagés dans l’étude de mécanismes régulant des processus complexes. Auscultent-ils pour autant différentes déclinaisons d’un même phénomène, identifiable comme larégulation ? L’emploi de cette notion semble, dans bien des contextes, aller de soi. Mais, de fait, son contenu varie énormément selon les besoins de la recherche, si bien que comparer différents exemples de régulations s’avère parfois complexe. 

La nécessité de clarifier le contenu de cette notion associée à la volonté de renforcer la cohésion de l’axe ont débouché, le 2 mars 2022, sur un atelier dédié à la régulation. À partir de documents d’archives choisis par leurs soins, participants et participantes ont proposé des éléments de définition, posant les jalons d’une conception commune de la régulation en sciences sociales, capable de soutenir la pluralité de ses occurrences ad hoc. Un retour sous forme de bilan de cette première journée est joint au présent appel. 

Une tension entre deux dimensions, complémentaires, mais parfois incompatibles de la régulation a été identifiée lors de cette journée. D’un côté, la notion peut renvoyer au fait de doter un phénomène d’un caractère régulier (impliquant une dimension incorporée et implicite). D’un autre, elle peut désigner un processus d’élaboration et de mise en œuvre de règles (supposant l’énonciation explicite des normes et des modalités de leur application). Cette ambivalence constitue une donnée positive pour notre connaissance du processus : dire qu’il peut nécessiter à la fois publicité et secret, transparence et manipulation n’est pas rien. Mais elle implique surtout que la régulation soit difficilement saisissable, d’où la nécessité de replonger dans les sources pour interroger l’ambiguïté – apparemment irréductible – du phénomène.

Trois pistes peuvent être envisagées afin d’approfondir la richesse et l’intérêt heuristique de cette double dimension de la régulation en histoire : 

  1. les manières de parler de la régulation (sémantique historique) ;
  2. les acteurs et leurs rôles dans les rapports de force des processus de négociation ;
  3. les différents champs d’application de la régulation. 

Ces approches de la régulation seront examinées lors de trois ateliers de chacun une demi-journée. 

Une approche méthodologique commune est proposée, basée sur l’idée de partir de sources et non d’un document issu d’une analyse menée à son terme. Le principe est que les participants amènent un document de leur choix, issu de leurs corpus d’étude. Il est également possible de proposer un ensemble de données plus large qui a été étudié de manière quantitative. Les deux approches micro/macro, close/distant reading, se complètent et l’une ne disqualifie pas l’autre. Le format de ces documents peuvent être de tout type, qu’il s’agisse d’extraits d’archives écrites, de documents iconographiques ou encore de retranscriptions d’entretiens. 

L’idée est de partir des documents pour construire une réflexion collective sur la conception historienne de la régulation. Ces ateliers doivent permettre, à travers l’exploration et la comparaison d’une multiplicité de cas concrets, d’accéder à une montée en généralité de l’analyse. Ainsi, un dernier atelier sera l’occasion de dresser une synthèse des différents moments de réflexion collective.

PROGRAMME :

  • L’atelier sur les acteurs : le 7 avril, de 9h à 13, salle André Bollier.
  • L’atelier sur les champs : le 28 avril, de 9h à 13h, salle André Bollier.
  • L’atelier de synthèse : le 10 mai, de 14h à 18h, salle Elise Rivet.

Atelier 2 – Les acteurs (7 avril, 9h-13h, salle André Bollier)

Créatrice de règles, de comportements, d’habitudes, la régulation entraîne souvent une recomposition des relations entre ses acteurs. Invités à prendre en charge le processus, les régulés sont, idéalement, appelés à devenir régulateurs à leur tour. De cette relative fluidité des rôles, changeants selon les lieux et les moments de la régulation, découle une difficulté à identifier précisément tous les acteurs engagés, ce qui complique toute schématisation diachronique de leurs fonctions et de leurs stratégies. Au-delà de la situation initiale, le couple régulateur/régulé ne se révèle pas forcément pertinent. De même, la dialectique dominant/dominé n’est pas nécessairement propice à l’analyse de toutes les dimensions d’une même situation de régulation. Faire le constat de ces difficultés offre néanmoins de nouvelles pistes : que la régulation conduise au rapprochement des régulateurs et des régulés implique l’existence d’individus ou de groupes faisant office de passeurs, d’entremetteurs, d’agents capables de traduire les besoins et les volontés des uns et des autres. L’atelier sera l’occasion de se pencher sur le mode de sélection, les savoirs et les savoirs-faires sociaux de ces acteurs que les sources qualifient parfois d’experts, de lanceurs d’alertes, d’arbitres, d’administrateurs ou de porte-parole. Il sera aussi envisageable d’esquisser quelques réflexions quant aux effets de leurs stratégies et de leurs possibles logiques de professionnalisation  sur l’épreuve régulatrice.

Atelier 3 –  Les champs: habiter la régulation (28 avril, 9h-13h, salle André Bollier)

En interrogeant la multiplicité des champs dans lesquels la régulation se manifeste, cet atelier propose une approche “par le bas” du phénomène régulateur. L’enjeu est ici d’examiner les réponses des populations aux procédés régulateurs dont ils font l’objet. Il s’agit d’interroger la possibilité de dresser une histoire de la régulation non pas au travers des institutions productrices de régulation, mais des acteurs visés et impliqués dans ce processus en tant que “régulés”. Diriger le regard vers la réception de la régulation doit permettre d’éclairer les contestations, négociations, et interprétations auxquelles elle donne lieu, mais aussi de parvenir à une meilleure compréhension collective des mécanismes sociaux aussi bien qu’économiques et politiques induits par le processus régulatif. L’atelier sera donc l’occasion de mobiliser des sources travaillées dans des approches d’histoire de la famille, du genre, ou encore des migrations, par exemple. 

Atelier 4 – La synthèse (10 mai, 14h-18h, salle Elise Rivet)

La synthèse sera l’occasion de revenir sur la dimension diachronique et évolutive du phénomène régulatif. A travers l’exploration des manifestations de la régulation dans des contextes et époques variés, il s’agit d’observer l’extension des champs de la régulation et les acteurs multiples de la négociation au cœur de la régulation. Ainsi, ce temps de synthèse sera l’occasion d’interroger la possibilité de proposer une histoire de la régulation en elle-même, et notamment de ses points de bascule.