000
100
%
Organisé par Clara Lieutaghi (Cehta – EHESS) et Clara Zajdela (Larhra – UGA)
Sentir Dieu ; percevoir l’Éternel par les sens. Un paradoxe qui fut le lieu d’un intense investissement aussi bien intellectuel que matériel. Parce que Dieu se rendit un jour présent en se faisant chair avant de mourir sur la croix pour ensuite ressusciter et enfin se retirer du monde, l’humain n’aura de cesse de le chercher.
L’alternance entre expérience et témoignage, mise en doute et preuve, structure le paradoxe de l’économie chrétienne dont l’épisode de l’incrédulité de saint Thomas se fait exemplaire : « Parce que tu m’as vu tu crois, dit le Christ à Thomas. Heureux ceux qui croient sans avoir vu. » (Jn. 20, 29). Pourtant, le désir de sentir la présence de ce « corps manquant » (De Certeau) est partout et devient presque constitutif de la pratique dévotionnelle chrétienne.
De la Dévotion moderne à « l’invasion mystique » (Bremond), le corps et l’expérience sensorielle se placent au coeur de la rencontre avec le divin. La performance de l’ensemble des dispositifs expérientiels conçoit que soit activée une présence potentielle qui peut se manifester via la conjonction de vecteurs matériels, sensoriels, cultuels et/ou virtuels. Elle a néanmoins, dès le début du christianisme, posé problème aux instances devant arbitrer la teneur et la légitimité de ces expériences vécues et décrites. Ces instances sont en effet confrontées à la difficulté de concilier d’un côté la promotion des signes sensibles de la présence divine sur Terre, et de l’autre la méfiance vis-à-vis de l’engagement du corps et des sens.
Dans une approche aussi bien multimédiale qu’interdisciplinaire, l’objectif de ces journées est de réfléchir ensemble aux diverses solutions (philosophiques, matérielles, juridiques, théologiques, dévotionnelle etc…) mises en place par la chrétienté moderne pour résoudre un paradoxe millénaire : comment réconcilier la nature de la perception humaine, avant tout sensorielle, avec celle de l’objet qu’elle tente de percevoir et dont la nature divine est justement infinie, inatteignable et insaisissable.