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Dans l’Europe des Lumières, le Grand Tour fait figure d’étape incontournable dans la formation des artistes et des amateurs. Entrepris en 1755 en compagnie du peintre Jean-Baptiste Greuze, le Voyage d’Italie de l’abbé Louis Gougenot constitue un témoignage exceptionnel d’un voyageur français en Italie au milieu du XVIIIe siècle. Resté inédit, son manuscrit va pourtant connaître un vif succès grâce à l’astronome Jérôme de Lalande qui a puisé dans ses jugements pour écrire son Voyage d’un Français en Italie, la référence pour quiconque se rend dans la péninsule jusqu’à la fin du XIXe siècle.

Toujours conservé dans une collection privée et courant sur trois épais volumes, le manuscrit de l’abbé Gougenot est accompagné de dessins de Greuze et de l’abbé. Notre édition critique invite le lecteur à suivre les pérégrinations de l’auteur – de Paris à son ascension du Vésuve – et à découvrir les richesses des églises et palais italiens. Le récit de Gougenot offre un formidable panorama des œuvres d’art conservées en Italie entre 1755 et 1756. Si certaines sont toujours présentes in situ, d’autres sont aujourd’hui dispersées dans les plus grands musées internationaux, reflétant l’histoire mouvementée des grandes collections italiennes. La description précise des villes françaises que traverse notre voyageur, notamment de leurs églises, est rendue encore plus précieuse du fait des destructions engendrées par la Révolution. Membre associé libre de la prestigieuse Académie royale de peinture et de sculpture, l’abbé Gougenot destinait vraisemblablement ses notes à la publication d’un guide qu’il n’a pu achever avant sa mort en 1767. Situé à un moment charnière de l’histoire du voyage en Italie, le texte de Gougenot témoigne aussi de la mondanité d’un tel périple, puisqu’il est l’occasion de fréquenter des personnalités parmi les plus influentes de la scène artistique et politique italienne. L’auteur ne manque pas aussi d’être attentif aux vêtements, notamment ceux portés par les paysannes et les bourgeoises dessinées par Greuze, qui scandent le manuscrit. Enfin, son insatiable curiosité pour le théâtre et surtout l’opéra fait de son récit un admirable pendant aux Lettres du Président de Brosses.